La 5ème édition datée de septembre 2017 de « L’évolution du positionnement international du Maroc », édité par l’Institut Royal des Études stratégiques vient de paraître.
Ce rapport, citant des sources comme le HCP et la FAO, contient une donnée à analyser avec toute la gravité qui s’impose. C’est, en hectares, celle de la quantité de terres arables par habitant en 2014 soit 0,24. Celle-ci était, il y a quelques années à peine, soit en 1998, de 0,33. Au lendemain de l’indépendance, en 1961, elle était de 0,54.
Ce chiffre, s’il s’explique, bien sûr par le fort taux d’accroissement démographique que connaît notre pays en plein développement est un indicateur clair et sans appel de la pression urbaine que connaissent nos villes vouées à une politique de l’espace aveugle au profit des lobbies de l’immobilier dont les appétits voraces et démesurés, ont découragé les meilleurs industriels nationaux à lâcher leurs entreprises créatrices de valeurs pour faire de l’argent facile, en achetant des terrains agricoles et les revendre quelques coups de pelles plus tard à des prix sans commune mesure avec le prix d’achat. Voilà à quoi se résume la politique immobilière du Maroc : faire de l’argent, beaucoup d’argent, en achetant des terres agricoles à bas prix pour les revendre en tant que terrains urbains.
Quant à la logique industrielle, elle est laissée aux bons soins de l’investissement étranger, qui se porte du reste bien, grâce à une politique dynamique d’ouverture. Sur ce registre, les nationaux font office de figurants, alors qu’en 1973 Feu Hassan II les avait fait rentrer, « marocanisation de l’économie » oblige, par la grande porte.
Mais revenons à ces chiffres si parlants qui indiquent clairement que le marocain est sur le point d’étouffer puisqu’il dispose actuellement, dans la campagne, de moins de la moitié de la surface qui lui était dévolue quand il a recouvré son indépendance.
Que faire alors ?
Il faut envisager une nouvelle politique de la ville basée sur de nouveaux paradigmes : celui, d’abord, que l’habitat collectif et en hauteur est la solution définitive à la croissance des cités. Les terres arables devant être, à tout prix, préservées de leur épuisement. Ce n’est pas de la prémonition, mais juste du bon sens.
Quand cette prise de conscience sera actée, il faudra totalement revoir la vision de l’espace qui sera portée par le Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville, qui ne consistera plus en son étalement continu au détriment des terres arables, mais en une véritable vision du comment vivre ensemble dans cette nouvelle urbanité.
Réfléchir à densifier les villes tout en leur permettant de se projeter dans la modernité qui les attend et de s’installer dans l’ère technico-environnementale à laquelle elles n’échapperont guère.
Restera un problème de taille : celui d’éduquer le peuple à cette nouvelle aventure urbaine qui demandera beaucoup de civisme et d’éducation. Et là, le même rapport attribue un zéro pointé au Maroc !
Paru dans CDM Chantiers du Maroc n°155 – Novembre 2017
Fouad Akalay