Ce n’est pas une question mais une affirmation formulée par Jaafar Tahiri, président de l’Association des importateurs de matériel BTP, lors de la conférence de presse organisée courant décembre par Promosalons, société responsable au Maroc de la promotion du salon INTERMAT au Maroc.
C’est devant une salle comble composée de journalistes et de chefs d’entreprises du BTP que Jaafar Tahiri a exprimé son indignation devant la léthargie des gouvernements successifs à ne pas prendre à bras le corps le problème de l’importation massive d’engins de chantier d’occasion et d’épaves réformées en provenance, essentiellement, du vieux continent.
Alors que le Maroc se targue d’être une économie en voie d’émergence, leader continental dans beaucoup de secteurs, il n’importe que 700 machines par an contre 1000 pour la petite Tunisie et 5000 pour nos voisins Algériens. Quant au Marché Turc auquel nous aimons parfois nous comparer, il caracole avec 12 000 véhicules importés !
Une situation que le Maroc a bien connu dans les années 70 et 80 quand nos routes nationales étaient envahies de centaines de milliers de voitures d’occasion participant, ainsi, aux nombreux accidents annuels enregistrés. Le parc automobile national voyait son âge grimper au grand dam des concessionnaires, officiellement installés dans le pays, qui écoulaient difficilement leurs stocks.
Ceci sans compter le manque à gagner pour les recettes de TVA et celles de la fiscalité, d’une manière générale, privée des contributions des organismes de crédit à l’impôt sur les sociétés, de l’IGR récolté par les nombreux employés dont ils déclarent intégralement leurs salaires etc. Au lieu de cela, le matériel d’occasion nourrit des réseaux plus ou moins occultes dont les profits alimentent des bénéficiaires qui échappent à l’impôt.
De plus, ces vieilles machines sont le plus souvent énergivores et polluantes à outrance. Il n’y a qu’à voir les chantiers de construction pour se rendre compte de cette catastrophe écologique quotidienne, au grand désarroi des importateurs de matériel neuf, qui éprouvent toutes les difficultés à écouler les quelques centaines d’unités importées annuellement.
Pourtant, beaucoup de pays, pour des raisons évidentes, ont interdit tout simplement l’importation de matériel de travaux publics d’occasion. Comme pour le secteur automobile, qui connaît une croissance sans pareil, celui du matériel de travaux publics peut sortir du marasme et le Maroc, avec les atouts qu’il détient en Afrique, devenir une plate-forme continentale et accueillir les grands constructeurs mondiaux.
Les raisons de cette situation déplorable sont uniquement dues à l’incompétence des gouvernements successifs, qui se sont succédé ces dernières années, à se pencher sur un dossier pourtant très simple d’analyse. Alors pourquoi tant de résistance ? Les entreprises de construction marocaines sont-elles réticentes et complices de cet état de choses ? Acheter du matériel d’occasion fait-il l’affaire de ces entrepreneurs au détriment des intérêts de la société ?
Lors du BTP EXPO 2017, la FNBTP n’a pas pu signer le nouveau contrat programme, les officiels ayant décidé de bouder l’événement. Cela se fera-t-il bientôt ? Le Maroc cessera-t-il d’être la poubelle de l’Europe ?
L’avenir nous le dira.
Paru dans CDM Chantiers du Maroc n°156 – Décembre 2017
Fouad Akalay