Le 28 février 2019, El Mouloudi Benhamane, président de la Fédération Nationale du Bâtiment et des Travaux Publics ( FNBTP ) a adressé une lettre circulaire à ses affiliés avec pour objet un énoncé qui tient en 3 lettres : casse des prix.
Il tire le signal d’alarme sur 3 maux principaux dont souffriraient les entreprises de construction, à savoir :
• les faillites avec ou sans dépôts de bilans
• les liquidations et redressements judiciaires
• les poursuites pouvant aller jusqu’au pénal
Il les exhorte de revoir les politiques de prix et à soumissionner à des montants raisonnables à même de couvrir leurs charges et faire des bénéfices.
La FNBTP, cette vénérable institution qui semble sortir d’une longue torpeur ne fait que payer aujourd’hui des années d’absence et d’encadrement du tissu entrepreneurial dont elle à la charge de défendre les intérêts. En dehors de quelques sociétés organisées, qui se comptent sur les doigts d’une seule main voire les deux, et que je salue au passage, les entreprise de construction sont sous équipées, sous encadrées et surtout mal gérées.
A telle enseigne que les constructions actuelles sont loin d’atteindre la qualité d’exécution de celle bâties par leurs confrères du siècle passé. Dans le Maroc d’aujourd’hui on ne sait plus faire d’enduit, ni poser des carreaux sur les façades sans qu’ils ne tombent dès les constructions livrées, les escaliers sont mal balancés et irréguliers dans leurs hauteurs comme dans leurs girons…bref les constructions sont d’une qualité si médiocre qu’elle rend le travail de l’architecte difficile, l’obligeant à effectuer sa mission bien au-delà du cadre normatif qui régit son métier. Au lieu de superviser les travaux, il doit se transformer en contremaitre afin de palier les défaillances des entreprises qui recrutent, très souvent, de la main d’œuvre incompétente sans la former et rarement déclarée à la sécurité sociale.
Ceci sans compter l’incurie des entreprises sur le volet sécurité. Les chantiers sans palissades, les excavations périlleuses, les échafaudages de fortune, l’absence d’équipements individuels de sécurité… font de chaque projet un terrain de guerre miné. Cela exige de l’architecte une vigilance permanente, hors de son contexte contractuel, pendant que le promoteur, non inquiété par le législateur, compte son argent !
Voilà succinctement l’état des chantiers de construction que la FNBTP encadre et pour lesquels elle demande plus d’argent ! Absente sur tous les registres, sauf celui du contrat programme pour lequel elle s’active à lutter contre la concurrence étrangère, l’association professionnelle sort de sa léthargie pour ne s’intéresser qu’aux prix pratiqués sans pour autant proposer une mise à niveau de ses engagements sociaux et sociétaux pourtant plus que nécessaires.
Dès lors, il ne faut pas s’étonner du sort réservé à l’appel de son président, resté lettre morte !
Fouad Akalay
Paru dans CDM Chantiers du Maroc n°70 – Mars 2019