Le dernier rapport de la cour des comptes, qui vient d’être rendu public, n’a pas manqué de critiquer, sévèrement, la gestion de l’Agence nationale pour le développement des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique (ADEREE). Elle a, depuis, changé de nom pour devenir l’ AMEE (Agence Marocaine pour l’Efficacité Énergétique). Inutile, dès lors, de s’étonner de l’embourbement dans lequel se trouve le Règlement Technique de la Construction au Maroc (RTCM) rendu obligatoire et pourtant inappliqué à ce jour. Sans compter la dizaine de millions d’euros distribués à tort et à travers à des projets dits exemplaires mais qui, en réalité, n’ont d’exemplaires que les motivations pour lesquelles ils ont été distribués une petite minorité de chanceux qui se comptent sur les doigts des deux mains. Des milliards de dirhams qui auraient servi à promouvoir une véritable révolution énergétique dans le bâtiment. L’audit de la cour des comptes, que nous vous livrons ici, est sans appel.
L’Agence nationale pour le développement des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique (ADEREE), créée par la loi n°16.09 du 11 février 2010, est un établissement public placé sous la tutelle du ministère de l’énergie et des mines de l’eau et de l’environnement. Le budget de l’ADEREE, qui a passé de 41 MDH en 2009 à 55 MDH, en 2015, a été financé, essentiellement, par le budget général de l’Etat. L’Agence réalise aussi des recettes dans le cadre de la coopération nationale et internationale gérées dans un compte hors budget. En outre, les charges sociales de l’Agence s’élèvent à 32 MDH. D’autre part, la mission de contrôle de la gestion de l’ADEREE a permis de soulever plusieurs remarques dont les plus importantes sont citées comme suit:
1. Contribution de l’ADEREE à l’exécution de la stratégie énergétique nationale
- Définition Insuffisante du rôle de l’ADEREE dans la mise en œuvre de la stratégie énergétique nationale
Bien que l’ADEREE est tenue, en vertu des dispositions de l’alinéa 1er de l’article 3 de la loi n°16.09, de « proposer à l’Administration un plan national et des plans sectoriels et régionaux de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique ». Elle n’a pas pu, pour autant, depuis sa création en 2010, définir de manière précise sa contribution à la mise en œuvre de cette stratégie par rapport aux autres intervenants. Devant ce manque de visibilité, l’ADEREE s’est trouvée dans l’incapacité de développer des plans d’action s’inscrivant dans l’exécution des objectifs globaux définis dans la stratégie énergétique nationale en matière des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. - Faible articulation entre les projets lancés et les objectifs principaux de la stratégie énergétique nationale
Les projets initiés par l’Agence pendant la période 2010 à 2015 n’ont pas eu d’impact direct sur l’atteinte des objectifs de la stratégie nationale. Ceci peut être expliqué par le fait que l’Aderee est restée cantonnée dans la logique d’action de la période précédente où elle était encore un centre de développement des énergies renouvelables (CDER), privilégiant, ainsi, la réalisation des études à caractère général au détriment de la concrétisation de programmes ayant une plus-value opérationnelle. A ce titre, l’essentiel des projets menés par l’Agence durant la période examinée, toutes filières confondues, ont concerné l’identification et l’évaluation du potentiel énergétique et non sa mobilisation. - Faible contribution dans l’exécution de la stratégie énergétique nationale
a. En matière des énergies renouvelables La plupart des projets et des plans d’action proposés au conseil d’administration se limitent à regrouper des actions hétérogènes en l’absence d’une vision d’ensemble permettant de les fédérer autour d’axes majeurs. D’ailleurs, la majorité de ces projets sont hérités de l’ex-CDER. En plus, il a été constaté que ces projets sont limités, s’inscrivent dans le court terme et ne répond qu’à des besoins immédiats et ponctuels. De même que d’autres projets se focalisent sur des activités subsidiaires ne traduisant pas les objectifs primordiaux de la stratégie énergétique nationale.
b. En matière de l’efficacité énergétique L’ADEREE n’a pas décliné le volet de l’efficacité énergétique de la stratégie nationale en plans d’action, et s’est limitée à exécuter des projets lancés par l’ex-CDER. Dans cette optique, au lieu que l’Aderee porte des projets dans le domaine de l’efficacité énergétique, elle a été chargé de réaliser, en 2012, une étude pour proposer une stratégie nationale d’efficacité énergétique ayant pour objectif de réduire la consommation énergétique nationale de 25% à l’horizon 2030. Ainsi, même si l’Agence a réalisé cette étude, sa stratégie d’intervention dans ce domaine n’a pas été approuvée par son conseil d’administration vue que celui-ci ne s’est pas réuni depuis 2014. Il importe néanmoins de souligner que la consultation des activités de l’Agence sur le plan international a permis de constater que celle-ci adopte des programmes et projets financés par les partenaires sans étude préalable susceptible de déterminer ses besoins et ses objectifs effectifs de ces projets, et aussi, sans pouvoir s’assurer de la conformité de ces projets avec son champ de compétence et d’intervention. Ainsi, il convient de noter que le rôle de l’Agence s’est limité à accomplir plusieurs tâches sans qu’elles aient un impact sur la préparation et la réalisation des projets opérationnels pour l’exploitation des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique.
2. Réalisations dans le domaine des énergies renouvelables
Le comité de contrôle a examiné un portefeuille de 12 projets lancés par l’Aderee entre 2010 et 2015 dans le domaine des énergies renouvelables. Et elle a constaté que 3 d’entre eux ne sont pas encore achevés, à savoir : – La réalisation d’une étude du potentiel de pompage solaire dans les zones des oasis ; – L’étude d’installation des microcentrales hydrauliques dans quatre sites dans la province d’Azilal ; – Le projet de certification des stations de mesure du vent. Aussi, certains projets ont enregistré des retards qui ont atteint quatre années. C’est le cas, à titre d’illustration, de l’étude d’identification d’un portefeuille de projets d’investissement dans le domaine de la biomasse au niveau régional.
3. Réalisations dans le domaine de l’efficacité énergétique
L’Aderee a élaboré un plan d’action pour la période 2011-2015 qui est resté limité par rapport au type et au nombre de mesures édictées par la stratégie énergétique nationale en ce qui concerne l’efficacité énergétique. De même, l’Agence s’est contentée, seulement, d’accomplir la réalisation des programmes initiés, dans ce domaine, par l’ex-CDER pour la période 2009-2011. Et ce, sans que ces projets aient un impact positif sur la capitalisation des compétences propres de l’Agence. De plus, ces projets et ces actions n’étaient pas à la hauteur des nouvelles missions assignées à l’Agence.
La rédaction